La recherche spatiale et les communications avec Mars Episode 4 : les communications entre Mars et la Terre

17 novembre 2021

Comme évoqué lors du premier épisode, les distances entre Mars et la Terre nécessitent des moyens sophistiqués d’émission et de réception. Les communications se font soit directement de la surface de Mars vers la Terre, par le biais d’antennes à fort ou faible gains (ces dernières ne faisant que recevoir, leur gain étant trop faible pour émettre), soit par l’intermédiaire d’un satellite en orbite autour de Mars servant de relais. La difficulté à produire de l’énergie sur Mars limite les puissances d’émission, ce qui constitue un handicap supplémentaire. En effet, aucun rover ni aucun satellite n’est capable, comme sur Terre, de délivrer 400 kW à son antenne en se branchant sur le réseau électrique !

Dans le cas des liaisons directes,  la bande X est privilégiée et plus particulièrement les bandes 8400-8450 MHz pour l’envoi de données et de télémesure depuis Mars (portant par exemple sur l’état des rovers). C’est la bande  7145-7190 MHz qui est utilisée en retour pour les commandes de contrôle depuis la Terre.  Dans le cas des liaisons indirectes, les satellites jouent le rôle de relais. Le lien entre équipements à la surface de Mars et orbiteurs se fait principalement en bande UHF et le lien des orbiteurs vers les stations sur Terre en bande X (éventuellement en bande Ka, lorsque l’orbiteur dispose d’un transpondeur).

Figure 1 : Représentation synthétique des liaisons entre Mars et la Terre (Curiosity)

Le type de liaison choisi a un impact considérable sur les débits de communication car ceux-ci sont fonction aussi bien de la fréquence utilisée que de la puissance reçue. Par exemple, un signal émis depuis Perseverance/Curiosity en UHF (15 W de puissance, 0 dBi de gain) vers un des satellites au zénith à 400 km (MRO/Odyssey) pourrait y être reçu avec un niveau de -126 dBW (ou -96 dBm), ce qui permet une très bonne réception. Ce même signal peut aussi être émis directement par l’un des rovers à l’aide de son antenne à fort gain (15W, 25 dBi) en bande X vers la Terre : à 200 millions de kilomètres de distance, même avec une antenne terrestre de 70 m de diamètre (74 dBi), son niveau serait de -166 dBW (ou -136 dBm) et la puissance captée donc serait 10 000 fois plus faible. Les satellites en orbite autour de Mars, quant à eux, présentent, pour leurs antennes les plus performantes, des gains supérieurs de 15 à 20 dB, ainsi qu’une puissance accrue jusqu’à  8 dB : le signal reçu sur Terre sera alors de l’ordre de -143/-138 dBW (-113/-108 dBm). En bande X, les niveaux de signaux des orbiteurs reçus sur Terre sont donc nettement plus élevés (jusqu’à 600 fois) que ceux des rovers.  La NASA estime ainsi que le débit en transmission/réception en bande X sur un lien direct rover-Terre peut culminer, à condition d’utiliser l’antenne à gain élevé, à 160/500 bits par seconde s’il est capté par une antenne de 34 m et 800/3000 bits par seconde avec une antenne de 70 m de diamètre. Si le rover a recours à son antenne à faible gain, le débit utile chutera à 10 bits par seconde avec une antenne de 34 m et à 30 bits pour l’antenne de 70 m. En revanche, le rover peut échanger en UHF avec un satellite martien à des débits pouvant atteindre jusqu’à 2 Mb/s. Et l’orbiteur, quant à lui, peut atteindre des débits vers la Terre de 0,5 à 3 Mb/s. On comprend dès lors que la liaison indirecte soit privilégiée pour transmettre les données de Mars vers la Terre.

Il faut aussi rappeler que la distance entre les deux astres implique aussi de longs temps de transit pour l’onde émise. Avec une distance entre les deux planètes variant entre 55 et 400 millions de kilomètres, les temps de propagation vont ainsi de 183 secondes (3 minutes et 3 secondes) à  1 300 secondes (21 minutes et 40 secondes). A cela, il faut ajouter des effets Doppler importants (de plusieurs kHz) dus à une double mobilité : celle du satellite tournant autour de Mars, et celle de Mars qui se déplace par rapport à la Terre. Les récepteurs s’en accommodent – et même au-delà : en effet, comme les émetteurs martiens utilisent des porteuses stables et connues, les fréquences auxquelles leurs émissions sont reçues sur Terre permettent de déduire précisément leur vitesse de déplacement par rapport à la Terre !