Revue du "paquet télécoms" par la Commission européenne

Négociations 26 octobre 2016

La Commission européenne a publié le 14 septembre dernier ses propositions pour la revue du « paquet télécoms ». 

Elle fusionne les actuelles Directives « Cadre », « Autorisation », « Accès » et « Service universel » en un seul Code Européen des Communications Electroniques, sous la forme d’une seule Directive du Parlement et du Conseil. Ce nouveau Code propose ainsi des simplifications et des modifications significatives liées à l’évolution des réseaux et services depuis 2009, date de la dernière revue, ainsi qu’à l’émergence d’acteurs majeurs de services sans réseaux (« Over The Top »). 

Ce cadre tient compte des objectifs de connectivité et de déploiement de la 5G, intégrant la problématique des petites cellules et du Wifi. Il propose également de faire évoluer les missions de l’ORECE/BEREC.

 

En effet, la Commission européenne a publié le même jour, au sein d’un « paquet connectivité» : 

  • une proposition de règlement sur le financement du déploiement des accès sans fil par les collectivités locales afin d’amender des  règlements  existants liés aux mécanismes d’interconnexion en Europe ;
  • un plan d’action 5G qui fixe des objectifs politiques ambitieux aux Etats membres en matière de calendrier et de couverture (zones urbaines et axes de transport majeurs pour 2025) ; 
  • une communication sur la « société européenne du Gigabit » qui relaie certaines propositions de son code européen en faveur de la connectivité et invite les Etats membres à s’approprier son plan d’action 5G ;
  • une proposition de règlement pour doter l’ORECE/BEREC de nouvelles règles de gouvernance et compétences notamment dans le domaine des fréquences,  avec un rôle dans une revue par les « pairs », concernant toute disposition relative à l’attribution de droits individuels d’utilisation du spectre. 

 

Pour justifier sa réforme, la Commission déplore le retard européen dans l’essor de la 4G. Elle s’interroge sur les disparités dans la gestion du spectre des communications électroniques et l’apport d’une structure institutionnelle pour coordonner les procédures d’attributions individuelles ainsi que certains paramètres associés.

Un long processus de négociation va ainsi s’engager au Conseil et au Parlement. Le code européen ne devrait entrer en vigueur qu’à l’horizon 2020. A ce stade, les premiers débats s’engagent sur le projet de règlement sur le financement du déploiement des accès sans fil par les collectivités locales. 

 

Dans le domaine des fréquences, la Commission a construit ses propositions sur la base d’un cadre déjà connu

  • la Décision Spectre (décision No 676/2002/EC), qui permet l’élaboration de conditions techniques harmonisées en s’appuyant la contribution de la CEPT, reste en l’état ;
  • le groupe européen sur la politique du spectre, le RSPG, qui voit son rôle renforcé afin de conseiller la Commission, le Parlement et le Conseil sur la politique du spectre, à leur demande ; il pourrait, par exemple, émettre des recommandations sur la coordination aux frontières, sur le régime d’autorisation associé aux conditions techniques harmonisées, sur la synchronisation des calendriers des autorisations individuelles ; 
  • enfin, la Commission confirme le programme pluriannuel de politique du spectre (RSPP) qui reste en place et pourrait faire objet d’une proposition ultérieure, sans doute après la revue.  

 

Ce domaine demeure sensible, car les Etats membres avaient écarté le volet fréquences de la précédente initiative législative portant sur le marché unique des télécoms. Plusieurs points pourraient faire débat, par exemple :   

  • les nouvelles prérogatives de la Commission dans la gestion des fréquences  des communications électroniques et leur mode de contrôle par les Etats membres, via le RSPG, ou les comités de mise en œuvre de la Directive ; 
  • l’encadrement par la Commission des conditions d’utilisation sous autorisation générale visant à favoriser le partage ;
  • le rôle de la Commission dans la coordination aux frontières, domaine dans lequel les Etats membres s’appuient aujourd’hui avec succès sur des processus bi et multilatéraux, à l’image du WEDDIP, pour la bande UHF ;
  • le périmètre d’harmonisation des règles nationales de gestion du spectre des communications électroniques ;
  • l’équilibre institutionnel entre le BEREC réformé, le RSPG et  la Commission.    

 

Pour réussir sa réforme, la Commission devra être attentive aux propositions des Etats membres, comme elle l’a déjà fait en reprenant dans son projet de Code européen certaines propositions du RSPG : 

  • le cadre autorise ainsi de manière temporaire un usage alternatif à des conditions techniques harmonisées en cas d’absence de demande de marché, sous réserve que cela ne limite pas la disponibilité des fréquences dans les autres Etats membres et que l’objectif d’harmonisation à long terme soit maintenu ;
  • les Etats membres pourraient réexaminer les droits d’utilisation des fréquences en vigueur afin de pouvoir mettre en œuvre des conditions techniques harmonisées ;
  • les Etats membres pourront coopérer entre eux, avec le BEREC et la Commission, pour la mise en place d’un cadre d’autorisation multi-latéral ou même pan-européen. Cette procédure serait également soumise à la « revue des pairs » du BEREC. 

 

Les débats seront à la hauteur des attentes suscitées notamment par la 5G et la nécessité de soutenir l’essor des investissements du secteur dans notre pays et en Europe. L’ANFR y contribuera dans la mesure de ses compétences.