Le point 1.16 de l’ordre du jour de la CMR-19 : l’accès à la bande 5 GHz pour le Wifi

05 septembre 2019

Le point 1.16 de l’ordre du jour de la CMR-19 traite de l’extension des bandes Wifi déjà autorisées dans la bande 5 GHz et d’un allègement des conditions techniques associées. Ce point faisait suite à des travaux préparatoires à la CMR-15 en vue d’une éventuelle attribution au service mobile dans la bande 5 GHz. Ces études n’ont pu aboutir, des doutes étant apparus sur les possibilités de partage avec les services préexistants (exploration de la Terre par satellite, radars, ITS) : l’attribution mobile a finalement été écartée par la CMR-15.

La réalité du besoin de nouvelles bandes pour le Wifi n’est pas contestée. En effet, la capacité des fibres optiques oblige désormais bornes et boxes Wifi à offrir à leur tour des débits très élevés. Cela suppose de recourir à des canaux de transmission plus larges (80 MHz voire 160 MHz) et accroît d’autant les besoins en spectre pour le Wifi. Les difficultés à identifier des solutions viables dans les bandes 5 GHz ont d’ailleurs conduit à ouvrir un nouveau chantier dans les bandes 6 GHz, objet de l’article suivant.

Après 7 années d’études (en préparation des CMR-15 puis CMR-19), les avis convergent désormais sur l’impossibilité pour le Wifi d’utiliser la bande 5 350 - 5 470 MHz, compte tenu de l’impossibilité d’y protéger les satellites d’exploration de la Terre. La bande 5 850 – 5 925 MHz n’est pas plus propice à l’arrivée du Wifi : les ITS, dont les performances (latence, disponibilité, fiabilité) sont essentielles pour la sécurité des futurs véhicules autonomes, n’autorisent pas cette coexistence.  De même, les conditions techniques définies dans la bande 5 250 – 5 350 MHz ne seront pas revues car le partage avec le service d’exploration de la Terre s’avère déjà difficile à assurer. En revanche, les bandes 5 150 – 5 250 MHz et 5 725 – 5 850 MHz restent envisageables et font l’objet de vifs débats.

La bande 5 150 – 5 250 MHz est déjà ouverte au Wifi avec une puissance limitée à 200 mW, à l’intérieur des bâtiments. Les études préparatoires à la CMR-19 s’intéressaient surtout à une extension de l’utilisation en extérieur, qui suppose de protéger les liaisons montantes du mobile par satellite, utilisées dans le monde entier par la constellation Globalstar, mais aussi la télémesure aéronautique, utilisée par Airbus en France dans le bas de la bande, et quelques applications aéronautiques, notamment en Russie. Les études menées par l’ANFR ont montré dans un premier temps, qu’une utilisation dans les voitures (40 mW) et dans les trains (200 mW) ne changerait pas les conditions de partage actuelles. Une deuxième série d’études a ouvert d’autres possibilités d’exploitation en extérieur, c’est-à-dire protégeant les satellites Globalstar, à condition que le nombre de dispositifs concernés reste limité.  Cette possibilité pourrait convenir à des besoins exprimés pour une utilisation en extérieur de Wifi à 5 GHz pour des applications très spécifiques, par exemple les communications avec les drones. Ces extensions seraient utiles car la portion de la bande 5 GHz déjà disponible pour les applications en extérieur (5 470   -5725 MHz), utilisée en partage avec des radars, repose sur un dispositif appelé DFS (Dynamic Frequency Selection) inopérant pour des mobiles rapides (voitures, trains ou drones).

La position française pour le point 1.16 vise donc à étendre les possibilités d’utilisation en extérieur, tout en limitant à 200mW la puissance isotropique rayonnée équivalente (pire) ainsi que le type d’application visée, pour éviter toute prolifération de ces dispositifs. La proposition européenne commune proposée est conforme à cette position. Néanmoins, l’issue de la négociation lors de la CMR-19 reste incertaine du fait de propositions divergentes d’autres organisations régionales et Etats membres de l’UIT.  Certains pays souhaitent en effet, à l’instar des Etats-Unis, autoriser une utilisation en extérieur sans contrainte jusqu’à 4 W de puissance, malgré les risques de brouillage de Globalstar, tandis que d’autres soutiennent le statu quo dans la bande. 

Quant à la bande 5725 – 5 850 MHz, aucune nouvelle technique de réduction de brouillage n’a été proposée. Il s’agit en effet de protéger des radars à sauts de fréquences rapides. Les études montrent aussi les difficultés de protection systèmes de télépéage et tachygraphes dans la bande 5 795 – 5 815 MHz, harmonisée au niveau européen. La position française, qui privilégie la protection des services existants, s’oppose donc à l’attribution de cette bande en faveur du service mobile pour le Wifi. Après d’intenses débats, l’ECP soutient cette orientation ; mais, en parallèle, des études complémentaires ont été lancées au sein de la CEPT pour répondre à la demande de certains pays n’ayant pas fait ces choix pour les radars et le télépéage. La solution de partage à l’étude permettrait l’utilisation nationale du Wifi dans cette bande – tout en tenant compte des exigences de protection des télépéages, des tachygraphes et des radars dans d’autres pays et de la libre circulation des Wifi sous la directive RED. Ces travaux examineront par exemple comment mettre en œuvre une exclusion géographique soit locale, soit nationale, par exemple à l’aide d’une base de données. La décision de la CMR-19 pourrait néanmoins aller dans le sens du « no change », qui recueille le soutien de la plupart des organisations régionales pour des raisons différentes : soit à cause du besoin de protection de services existants, soit pour éviter de se faire imposer à travers le Règlement des radiocommunications des conditions plus restrictives que celles déjà en place au niveau national, par exemple aux Etats-Unis.