Coordinations aux frontières dans les DOM : Bandes 700 MHz et 3400-3800 MHz »
Bande 700 Mhz
La bande 700 MHz dans les Antilles
Dans la région des Antilles (Saint Martin, Saint Barthélémy, Guadeloupe et Martinique) les plans de fréquences européens en bande 700 MHz ne sont pas ou peu compatibles avec les plans de fréquences américains souvent utilisés dans cette partie du monde.
La figure ci-dessous identifie (rectangles rouges en filigrane) les bandes de fréquences problématiques, où des stations de base à l’émission dans une île peuvent brouiller des stations de base en réception dans une autre. En effet, les stations de base sont plus sensibles aux brouillages et sont, par nature, dégagées des obstacles de terrain.
Ainsi, dans la région des Antilles, entre 777 et 787 MHz, l’usage du plan de fréquence européen en bande 700 MHz qui est dans le sens descendant (DL) pourrait conduire à une dégradation de la réception des stations de base des systèmes exploitant la bande 13 du plan américain. Il est également noté qu’entre 728 et 733 MHz, des perturbations pourraient être observées en réception côté français, par l’usage dans le sens descendant (DL) de la Bande 85 par Antigua.
La carte ci-dessous illustre les niveaux de champ à 20 mètres de hauteur sur une largeur de bande de 10 MHz qui pourraient être reçus sur les iles de Saba-et-Saint-Eustache (BES), Saint-Kitts-and-Nevis (KNA), Antigua-et-Barbuda (ATG) et Montserrat (MSR) suite à la mise en service d’émetteurs en Guadeloupe, située au sud de ces îles. On peut observer que le seuil de 21 dBµV/m/10 MHz, correspondant à une désensibilisation supérieure à 3 dB, est largement dépassé sur le littoral.
En synthèse, nos études nous conduisent, pour les 3 derniers blocs de 2x5 MHz de la bande 700 MHz à Saint Martin, Saint Barthélémy, Guadeloupe et Martinique à identifier un risque de contraintes (par exemple, le respect d’un niveau de champ sur le territoire d’une île voisine) pour protéger la bande 777-787 MHz dans ces îles, qui dépendra d’éventuels accords de coordination.
Cependant le premier des 3 derniers blocs de la bande 700 MHz (773 MHz à 778 MHz) n’est affecté que sur 1 MHz (777-778 MHz) et des solutions de coexistence moins contraignantes pourraient être envisagées, liée à la « bande de garde native » qui est intrinsèque à la largeur de bloc considérée pour la technologie considérée (LTE par exemple).
Par ailleurs, l’administration de Sint-Marteen met en œuvre le plan européen pour la bande 700 MHz et l’accord multilatéral existant d’Anguilla, de Sint-Maarten, de la France et des Antilles Néerlandaises (Saba et Saint-Eustasius) indique que les 4 premiers blocs de fréquences, incluant donc 777-778 MHz, sont prioritaires pour la France. Dans cette zone, la protection d’iles plus lointaines peut néanmoins aussi être à considérer.
Enfin, cette bande a déjà été attribuée aux opérateurs mobiles sur Antigua, la Dominique et St Lucie, sur la base du plan américain.
Cas où un opérateur pourrait subir des brouillages
Cas où un opérateur pourrait être contraint pour protéger les iles voisines
La bande 700 MHz à l’ile de la Réunion et Mayotte
L’application de l’accord bilatéral franco-mauricien de 2017 aurait dû conduire à la libération de la bande 700 MHz (694-790 MHz) pour le service mobile au 30 juin 2019.
Cette date étant dépassée, les stations TNT mauriciennes ne peuvent plus prétendre à protection et ne doivent pas produire de brouillages préjudiciables sur l’ile de la Réunion. De plus, selon l’administration mauricienne, la libération est attendue pour fin septembre 2021 et l’étude d’impact faite par l’Agence ne révèle pas de risques excessifs de brouillage. En effet, les niveaux reçus dans les canaux 57 à 60 sont très inférieurs aux seuils de brouillage des terminaux et, dans les bandes de réception des stations de base (canaux 50 à 53) les niveaux reçus sont inférieurs à 31 dBµV/m/5 MHz, ce qu’un opérateur devrait pouvoir accepter dans une phase transitoire.
Par ailleurs, la bande 700 MHz a été totalement libérée des émetteurs TNT par l’Union des Comores ce qui garantit un déploiement des réseaux mobiles sans brouillage sur le département de Mayotte.
Bande 3400-3800 Mhz
La bande 3400-3800 MHz sur l’ile de la Réunion
L’autorité mauricienne en charge de la régulation (ICTA) envisage l’introduction des services 5G dans la bande 3400-3600 MHz et a demandé la protection de plusieurs stations terriennes du service fixe par satellite (FSS) au-dessus de 3600 MHz, une consultation publique est attendue prochainement.
L’Agence a conduit des études sur les contraintes de déploiement de la 5G liées à la protection vis-à-vis de la 5G de ces stations terriennes. Cinq stations FSS sont au-dessus de 3840 MHz et ne représentent donc aucune contrainte pour les futurs services 5G de la Réunion. Cinq autres stations FSS sont présentes dans la bande 3600-3800 MHz dont deux localisées au plus proche sur l’ile principale à moins de 300 km. Après analyse, aucune contrainte n’est à envisager comme le montre la zone d’exclusion calculée par l’Agence ci-dessous.
La bande 3400-3800 MHz dans les Antilles
Contexte réglementaire
Comme ailleurs dans le monde, la bande 3,6-3,8 GHz, et dans une moindre mesure la bande 3,4-3,6 GHz, peuvent être utilisées dans les Antilles par des stations terriennes en réception
- Dans la bande 3,4-3,6 GHz, le Règlement des Radiocommunications prévoit via la note 5.431B la protection des stations terriennes en définissant une limite de densité surfacique de puissance aux frontières qui ne doit pas dépasser -154.5 dBW/m²/4kHz (20% du temps), soit 22 dBµV/m par bloc de 5 MHz.
- Dans la bande 3,6-3,8 GHz, aucune limite n’est définie, ce qui s’explique par le caractère historique de l’attribution mobile dans cette bande en Région 2 de l’ UIT . Le principe du premier arrivé – premier servi s’applique donc dans cette bande et il conviendra de faire attention à notifier des stations de base à l’ UIT pour les inscrire au registre international des fréquences (Master International Frequency Register - MIFR). L’identification de cette bande en Région 2 (Amériques) pour les IMT est à l’ordre du jour de la CMR -23 et la position française est d’aligner les règles de protection des stations terriennes sur celles en vigueur dans la bande 3,4-3,6 GHz.
Afin d’identifier les contraintes qui pourraient être appliqué sur les territoires français, L’ANFR a consulté ses homologues des îles et pays frontaliers et ainsi récolté les informations sur les stations FSS existantes, pour deux administrations, l’ECTEL et le Brésil.
L’administration de l’ECTEL a communiqué une liste de 3 stations à protéger, pour lesquelles aucune zone d’impact n’a été identifiée.
L’administration du Brésil a communiqué une liste de stations FSS sur son territoire, des migrations sont en cours afin de limiter les utilisations au-dessus de la bande 3720 MHz.
Sur la base des éléments communiquées, des calculs ont été réalisés avec les stations FSS/VSAT du Brésil. Les résultats montrent que les seules zones légèrement affectées se trouvent dans des zones sans habitations. Les stations FSS/VSAT du Brésil ne nécessitent pas l’identification d’une zone de contrainte notamment au niveau de la ville de Saint-Georges. Une analyse similaire est également faite pour les stations FSS/VSAT de l’ECTEL, aucune contrainte n’est identifiée en Guadeloupe ou Martinique. L’étude de l’Agence peut être téléchargée en cliquant ici.
Il y a aussi de nombreuses stations FSS au Brésil dont les assignations sont au-dessus de 3840 MHz. Aucun impact n’est attendu en raison de l’écart en fréquences et des angles d’élévation des stations.
Par ailleurs, l’extension de l’identification IMT à toute la bande 3400-3800 MHz en Région 2, est un point à l’ordre du jour de la CMR-23 et traduit une tendance vers une extension progressive des usages 5G dans la bande.
Quel usage de la bande par les services fixe et mobile dans les Caraïbes ?
En novembre 2019, l’Agence a participé à une réunion de la CTU (Caribbean Telecommunications Union) pour sensibiliser les administrations voisines à la problématique de la synchronisation TDD en 5G dans la bande 3400-3800 MHz. Un questionnaire sur les usages a été soumis afin de mieux cerner les usages actuels et les besoins futurs. A la lumière des réponses reçues, on peut conclure que de nombreux systèmes fixe ou mobile, autres que les systèmes TDD 5G sont et seront présents dans la bande dans les années à venir.
En effet, les iles Vierges Britanniques envisagent une migration de leurs systèmes FDD (3475-3500 UL/ 3537-3600 DL) vers le LTE TDD (3600-3800 MHz) en 2021, la partie hollandaise de l’ile de Saint Martin exploite un système propriétaire PMP450, en mode TDD, de type Point à Multipoint (PMP) dans les sous-bandes (3410-3473/3510-3573MHz) qui sera à terme très probablement remplacé par du LTE, les iles d’Antigua et Barbuda exploite des systèmes TDD entre 3400-3500 MHz et Trinidad et Tobago a déployé des systèmes Wimax dans la bande 3400-3800 MHz. L’ile de la Dominique utilise un système LMDS entre 3450 et 3580 MHz et Montserrat a identifié la bande pour les systèmes Wimax mais ne semble pas l’utiliser (ce dernier point reste à confirmer).
Quelle structure de trame pour la 5G en région des Caraïbes ?
Dans ces conditions, une trame dite « pure 5G » non compatible LTE risque de conduire à une impossibilité de synchronisation et à des brouillages entre les iles. Par ailleurs, les études de l’Agence ont conduit à la conclusion que les conditions de propagation dite « mer chaude » conduisent à des niveaux de champ élevés d’une ile à ile à l’autre, comme le montre la figure ci-dessous entre les iles françaises de Saint-Martin et de la Guadeloupe.
Compte tenu des distances en jeu, un temps de garde (GP) important est aussi à prévoir dans le choix des paramètres de la structure de trame 5G, contrairement à la métropole pour compenser des retards qui sont de l’ordre de 800 µs.
Enfin, l’Agence a étudié l’impact du choix d’une trame sur la cohabitation avec les systèmes existants comme le Wimax. Sur la base du rapport ECC 216, elle a identifié la trame LTE permettant d’une part de satisfaire à la condition d’un temps de garde (GP) important et d’autre part de maximiser les configurations Wimax compatibles, ainsi que la trame 5G NR correspondante (en vert dans l’extrait ci-dessous).
Compatibilité entre trames Wimax et trames LTE (extrait du rapport ECC 216)
Il apparait que, du point de vue de la possibilité de synchronisation entre systèmes pour éviter les brouillages, la trame LTE configuration n°2 (trame 3GPP DSUDD +3ms ou DDDSU) avec une sous-trame spéciale n°0 est optimale. Elle offre un temps de garde de 714 µs, résolvant ainsi la plupart des cas de brouillages inter-iles avec un ratio DL à 64.3%. Comme le montre ce tableau, elle est fortement compatible avec le Wimax, contrairement à la trame métropolitaine LTE configuration n°2, sous-trame spéciale n°7. Il est important de souligner que le rapport ECC 216 présuppose un alignement des instants auxquels les trames débutent leur transmission dans le sens descendant, ce qui impose un décalage de 3ms de la trame 3GPP en LTE.
Pour la 5G, la structure de trame correspondante serait DDDDDDS1S2UU incluant le décale de + 3ms avec le slot S1 = (6 symboles DL, 8 GP, 0 UL) et le slot S2 = (0 DL, 12 GP, 2 symboles UL) correspondant respectivement au « Slot Format 3GPP » n°18 et n°9.
L’analyse du tableau permet également de conclure que la trame métropolitaine LTE configuration n°2, sous-trame spéciale n°7 qui possède un ratio DL à 74.3%, reste 100% compatible avec la trame LTE configuration n°2, sous-trame spéciale n°0, en cas de déploiement de réseaux hétérogènes sur une ile, mais toujours avec un décalage temporel de + 3ms.
Choix des trames en Région 2
L’Agence, en concertation avec l’Arcep, a récemment signé un accord avec les îles d’Anguilla, de Sint Maarten, de Saba-Sint-Eustatius avec l’identification de la trame DDDSU, après échange et confirmation auprès des administrations voisines des usages de la bande 3.4-3.8 GHz.
Un choix similaire de trame est prévu pour la Guyane,
En ce qui concerne les îles de la Guadeloupe et de la Martinique, la trame 5G compatible avec le LTE a finalement été retenue pour continuer les échanges avec les administrations de l’ECTEL, MONTSERRAT et ANTIGUA.