Le spectre face aux défis du changement climatique

23 juillet 2021

Avec son pacte vert, la Présidente Von der Leyen a placé la lutte contre le changement climatique au cœur de son mandat à la tête de la Commission européenne et multiplie les objectifs ambitieux[1] pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, inciter aux énergies renouvelables et limiter la consommation d’énergie. La politique européenne des fréquences, multi-sectorielle, peut contribuer à cette dynamique européenne : le RSPG a ainsi publié un rapport sur les enjeux posés par la lutte contre le changement climatique aux gestionnaires des fréquences.

Les Etats membres ont noté les actions volontaires sectorielles, comme celle des opérateurs mobiles[2] ou d’autres acteurs européens[3] et les initiatives à plus long terme de la Commission sur l’économie circulaire[4] et l’« Ecoconception »[5]. Ils plaident pour des stratégies nationales sur les technologies numériques et invitent la Commission à s’appuyer sur ces initiatives pour développer une stratégie européenne.

La performance énergétique des équipements radio s’est trouvée questionnée avec l’arrivée de la 5G en Europe. En réponse, les Etats membres invitent la Commission à prendre en compte l’efficacité énergétique et toutes les questions liées plus largement au changement climatique lors de financements de projets de recherche sur la 6G. La Commission devrait s’appuyer sur le processus normatif européen pour évaluer les performances énergétiques des équipements radio. Obtenir un référentiel reconnu et incontesté représente un nouveau défi bien que le processus normatif soit actif depuis des années sur ces questions.

Les fréquences harmonisées constituent un levier pour la lutte contre le changement climatique dans plusieurs secteurs :

  • l’énergie, qui voit apparaître de nouveaux acteurs, les énergies renouvelables et vertes ou le suivi de consommation ;
  • les infrastructures et équipements : smart energy, smart grid, smart meters, domotique ;
  • la transformation des villes, avec la transition vers les smart cities ;
  • les transports, toujours plus intelligents ;
  • la mutation du secteur de l’agriculture.


Le RSPG pointe également l’évolution du secteur automobile vers la motorisation électrique, qui s’accompagne de développements pour faciliter les recharges sans fil. Il recommande l’analyse de la coexistence avec les services radio opérant dans la bande HF.

Pour répondre à ces besoins sectoriels, de nouvelles fréquences ont récemment été harmonisées en Europe, par exemple pour les objets connectés ou les compteurs intelligents (notamment dans les bandes 800 et 900 MHz). Les communications de machines à machines, y compris via les réseaux mobiles, ont aussi fait l’objet d’harmonisation, notamment dans le contexte des véhicules intelligents et des systèmes de communications des métros et trains. La 5G ouvre également de nouvelles perspectives avec ses caractéristiques de faible latence.

Le RSPG souligne par ailleurs que les services scientifiques resteront des maillons essentiels dans cette lutte contre le changement climatique : prévisions météo, collecte de données sur le climat,  température des océans…. Ces programmes exploitent de nombreuses bandes de fréquences bénéficiant d’une protection à long terme reconnue par le cadre réglementaire international. S’ils n’expriment pas de besoin pour de nouvelles bandes de fréquences, ces services aspirent avant tout à faire respecter leurs exigences de protection. Un débat majeur de la dernière conférence mondiale (CMR-19) portait d’ailleurs sur la protection de la bande passive 24 GHz face à la 5G dans les bandes 26 ou 28 GHz. Le RSPG rappelle à nouveau ces fondamentaux, dans le prolongement de son avis sur les services scientifiques publié il y a plus de 10 ans.

Le RSPG relève aussi les brouillages récurrents par les RLAN 5 GHz des radars météo actifs dans la bande 5 600-5 650 MHz, régulièrement évoqués dans nos lettres d’information. Alors que les brouillages sont en hausse dans de nombreux pays européens, y compris en France, les Etats membres appellent la Commission à prendre en compte la dimension politique de cette situation. Ils invitent la Commission d’une part à s’engager pour recenser et mettre en œuvre des solutions permettant d’inverser cette tendance et, d’autre part, à appuyer les Etats membres dans leurs actions, y compris en facilitant la coopération entre contrôle du spectre et surveillance de marché, à l’échelle nationale et européenne.

En outre, le RSPG met en évidence le potentiel du code européen des communications électroniques, transposé dans les Etats membres depuis la fin de l’année 2020, qui permet d’intégrer dans de futures autorisations des obligations ou incitations pour lutter contre le changement climatique. Plusieurs facteurs contribuant à la réduction de consommation d’énergie sont mentionnés : par exemple, l’attribution de blocs de fréquences contigus suffisamment larges et associés à des mécanismes d’agrégation de porteuses, qui apporte un cadre européen favorable au déploiement des petites cellules, ou encore l’exploration des solutions de partage d’infrastructures.

Les Etats membres évoquent enfin l’opportunité d’un rapport qui serait demandé aux opérateurs sur les actions envisagées pour répondre aux objectifs européens environnementaux et à leur harmonisation.

Un projet d’avis est en consultation publique jusqu’à fin août en vue d’une adoption au RSPG de novembre.


[1] ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/european-green-deal_fr

[2] www.gsma.com/gsmaeurope/whats-new/eu-green-deal/

[3] digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/companies-take-action-support-green-and-digital-transformation-eu

[4] ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_420

[5] europa.eu/youreurope/business/product-requirements/compliance/ecodesign/index_fr.htm - Directive Eco design