La recherche spatiale et les communications avec Mars Episode 1 : le réseau deep space network

29 juin 2021

Notre planète est la troisième planète la plus proche du soleil et il lui faut environ 365 jours et 6 heures pour effectuer un tour complet autour de lui. Quant à Mars, elle est en quatrième et effectue cette rotation autour de notre étoile en 1,9 année environ. Les deux planètes ont une rotation elliptique autour du soleil, mais l’excentricité de l’orbite de Mars est 8 fois supérieure à celle de l’orbite terrestre. Ainsi, la différence de longueur entre le point le plus proche (périhélie) et le point le plus éloigné du Soleil (aphélie) sur l’orbite terrestre est d’environ 5 millions de kilomètres,  alors qu’elle dépasse 40 millions de kilomètres pour l’orbite martienne. Cela a une importance considérable dans les transmissions entre la Terre et Mars : au plus proche, la distance entre les planètes est de l’ordre de 55 millions de kilomètres, mais leur éloignement peut dépasser 400 millions de kilomètres. 

Les communications entre Mars et la Terre doivent donc être dimensionnées pour que les signaux puissent être reçus malgré ces énormes distances. A titre d’exemple, l’atténuation en espace libre d’une onde électromagnétique sur la distance la plus courte entre les deux planètes est de 253 dB (soit une puissance divisée par 2 x 1025) en bande S (2 GHz) et s’accroît de 12 dB (soit une nouvelle division par 16…) en bande X (8 GHz).  A cela il faut bien entendu ajouter les obstructions potentielles sur le trajet :

  • la présence transitoire du soleil ou d’autres corps célestes entre les deux planètes (phénomène de conjonction). Le soleil reste une extraordinaire source d’interférence, puisque <link toutes-les-actualites actualites le-soleil-sous-haute-surveillance-depuis-la-france>cette étoile émet des champs électromagnétiques sur une plage importante de longueur d’onde. Même si son rayonnement maximal se fait dans les domaines du visible, de l’infrarouge et de l’ultraviolet, il n’existe pas réellement de méthode pour réduire le niveau des interférences que génère le soleil. Lorsqu’il se trouve entre Mars et la Terre, les communications cessent, dans l’attente d’une configuration plus favorable ; 
  • les rotations que chacune d’entre elles effectue continument sur son axe. La solution a été de placer plusieurs points d’émission/réception sur la surface du globe terrestre pour en avoir toujours au moins un en visibilité de l’astre rouge et de mettre un relais en orbite autour de Mars pour maintenir la communication lorsque le point d’émission/réception sur Mars nous est caché.


Le réseau le plus connu sur Terre pour émettre et recevoir des informations vers ou depuis l’espace est le DSN (Deep Space Network). C’est un réseau de trois sites régulièrement espacés sur le globe. Deux sont dans l’hémisphère Nord à Madrid en Espagne et à Goldstone aux Etats-Unis, le dernier dans l’hémisphère Sud à Canberra en Australie.  Cet agencement permet de s’assurer qu’un point éloigné reste, à tout moment, en visibilité d’une station, quelle que soit sa position dans l’espace.

Sur chacun de ces sites, on retrouve des antennes de dimensions impressionnantes comprises entre 34 et 70 m de diamètre, présentant des gains de l’ordre de 55 à 74 dBi selon l’antenne et la bande de fréquences. La plupart des récepteurs associés à ces antennes sont généralement refroidis à très basse température et  présentent donc des niveaux de bruit thermique extrêmement faibles, de l’ordre de la dizaine de Kelvin au zénith. Ces valeurs de température sont naturellement affectées par l’angle d’élévation à laquelle l’antenne observe par rapport au sol (la température globale du système augmente lorsque le foyer de l’antenne se rapproche du sol). Pour l’émission, la puissance de l’émetteur varie selon l’antenne et la bande utilisée, les puissances d’utilisation maximales étant entre 20 kW (43 dBW) et 400 kW (56 dBW).

Ainsi, la puissance isotrope rayonnée équivalente (p.i.r.e) en sortie d’une antenne DSN pourrait atteindre 126 dBW, soit environ 4 000 milliards de Watt. Aux moments où Mars et la Terre sont les plus proches, avec une atténuation de 253 dB en espace libre en bande S, il est donc possible de transmettre un champ à la surface de Mars de l’ordre de -127 dBW (ou -97 dBm), ce qui se rapproche d’un niveau reçu par un téléphone mobile à une distance moyenne d’une station de base. Autrement dit, un téléphone portable martien configuré dans les bonnes fréquences pourrait capter la Terre, même à 50 millions de kilomètres de ce relais très particulier. 

Photos du Deep Space Network (crédit : NASA).

A gauche, assemblage du réflecteur de 138 t de la station 36 en 2017 à Camberra, en dessous, photo du réseau d’antennes de Camberra, en bas à droite, complexe de Madrid et en haut à droite, antenne de Goldstone de 70 m de diamètre.